En cette période où les dossards et les sas de départ se font toujours rares, Strava et Distance lancent les Segments Series, une invitation pour les runners aux quatre coins de l’hexagone à décrocher leur meilleur chrono sur 12 segments répartis en France jusqu’au 7 février. En guise de première foulée, ne manquez pas notre série d’interviews mettant en lumière quelques-uns des athlètes les plus prometteurs de la nouvelle génération française. Nous avons partagé une journée avec eux pour nous faire une idée des efforts et sacrifices qu’ils fournissent au quotidien, pour comprendre leur état d’esprit après une année sans précédent, pour connaître leurs motivations et les rêves qu’ils nourrissent. C’était évidemment l’occasion de nous entraîner sur leur terrain de jeu favori avec un segment qui leur ressemble, selon leurs forces, leur spécialité ou leurs traits de caractère. Vous aurez donc la possibilité de vous mesurer à l’avenir de l’athlétisme français.

Embarquez pour un segment de vie de Fabien Palcau, raconté par l’équipe Distance et photographié par Anne Sophie Soudoplatoff.

FABIEN PALCAU
23 ans
Segment favori : Bois du Roy – Aller
Vice champion de France du 10000m et 5000m
Dijon, France

Salut Fabien, comment vas-tu et où en es-tu dans cette saison si particulière ?
Salut ! tout va très bien de mon côté. La période de confinement s’est très bien passée du point de vue de l’entraînement. Je l’ai vécue dans un cadre idéal, en bordure de champs avec la forêt à moins d’un kilomètre donc j’ai passé un très bon confinement, beaucoup d’entraînement. J’ai pu en profiter pour aller encore plus loin dans ma préparation.

Du coup, nous croyons savoir que tu as eu un résultat plutôt satisfaisant sur 10 000m sur piste ?
Ah ben oui oui ! Je fais 28’07 (NDLR : vice champion de France 2020) donc tout le travail des années passées et de cette période de 6 mois sans trop de compétition a payé donc ça c’est le plus important.

Ton ancien record c’était ?
29’37 sur route donc je lui mets 1’30 ! (grand sourire).

Comment est-ce que l’athlétisme est entré dans ta vie ?
On va dire que je suis tombé dedans quand j’étais petit, mes deux parents ont fait de la course d’orientation, du coup j’ai commencé la course d’orientation, la course en forêt dès 3-4 ans. J’ai toujours couru. Ma mère était licenciée au Dijon Université Club, mon club de toujours et encore actuel, dès que j’ai pu prendre une licence en école d’athlé, j’y suis allé et j’ai accroché tout de suite.

Donc tu as fait le choix de l’athlétisme plutôt que la course d’orientation.
Je voulais juste courir, je trouvais la course d’orientation un peu frustrante car je ne pouvais pas m’exprimer pleinement en course à pied avec les choix d’itinéraire, lire la carte, s’arrêter. Je ne voulais “que” courir donc je suis allé vers l’athlé très tôt, même si j’ai fait d’autres sports.

Quels autres sports ?
J’ai fait 5 ans de natation pour apprendre à nager mais je n’étais pas très bon et comme j’aime la compétition, jouer les titres, la gagne. Quand j’ai vu que j’étais loin derrière, ça ne m’a pas plu.

Quelles sont tes qualités et tes faiblesses ? Comment as-tu choisi ta spécialité ?
Pour les qualités je dirais plutôt des qualités mentales. Même si à une période c’était un point faible, aujourd’hui c’est devenu une qualité. Je suis à l’aise sur les efforts longs, on l’a vu car dès mon premier 10 bornes, j’ai tout de suite réalisé une bonne performance. Mon autre point fort c’est les fins de courses. Mes points faibles : la vitesse pure et la résistance lactique. Mes spécialités c’est 5000 et 10000 maintenant, et le cross, c’est là où j’étais le meilleur naturellement. En cross j’ai fait tout de suite des résultats, mon premier titre de champion de France je l’ai fait en cross, ma première sélection je l’ai obtenue en cross aussi. Ça s’est fait naturellement. J’ai fait un petit peu de 1500m mais on va dire que c’est plus éloigné de mes qualités naturelles, je me faisais battre en fin de course, j’avais du mal à finir vite comme les vrais coureurs de 15.

À quel moment as-tu réalisé que tu avais un potentiel, que tu sortais du lot ?
Je dirais à l’école primaire, quand on faisait de la course à pied en EPS, on devait faire des tours et je mettais beaucoup de tours aux autres alors que je ne m’entrainais pas du tout. Mes camarades de classe me demandaient comment c’était possible de courir aussi vite et je n’avais pas forcément de réponse ! C’est là que j’ai pris conscience que je pouvais peut-être faire quelque chose. C’est là aussi que j’ai eu l’envie de courir plus tard à très haut niveau.

Tu étais donc en primaire quand tu as commencé l’école d’athlétisme ?
Oui, j’ai eu un petit passage à vide au collège, ça m’intéressait moins, mais j’avais toujours cette vision de reprendre et de vraiment m’entrainer à fond à partir du lycée. Je savais déjà que j’allais être coureur plus tard. Certains voulaient être pompier, policier ou n’importe quoi, moi je voulais devenir coureur.

Qui sont les gens les plus importants qui t’accompagnent aujourd’hui dans ta progression ?
Ma famille, mes parents qui me soutiennent depuis le début, qui m’ont toujours soutenu et qui me soutiendront. Mes grands-parents aussi, la famille au sens large. Mon coach, Rémy Geoffroy, sans lui je n’en serais pas là aujourd’hui, donc je suis très reconnaissant. Tout le staff qui est autour de moi, que ce soit médical (mon kiné, mon osthéo, mon préparateur physique). Mon club qui a toujours été là. On est un club formateur, je pense à tous les coachs qui nous ont formés en petites catégories, qui nous félicitent, qui encouragent même quand ça ne va pas. Ça c’est vraiment top, c’est aussi grâce à eux que j’en suis là. Après il y a forcément le groupe d’entraînement avec notamment Alexis (NDLR : Alexis Miellet, champion de France sur 1500m en titre) puis tous les autres coureurs, le groupe fait beaucoup aussi.

Quelles sont les valeurs nécessaires pour être un athlète épanoui ?
Bonne question ! Je pense qu’il faut se donner les moyens de réussir à la hauteur de ses ambitions. Si on se fixe un objectif, il faut vraiment se donner les moyens d’atteindre cette performance, il faut faire tout pour que ça marche et ne pas être simplement déçu si on n’y arrive pas. Il faut se fixer des objectifs intermédiaires et être patient. La patience, la persévérance même après des contre performances quand on est déçu et triste, il faut garder une vision sur le long terme. Moi je marche sur le long terme, pas être sur du one shot mais se projeter loin et je pense que c’est comme ça qu’on est le plus épanoui malgré les jours où on est pas bien en compétition, ça arrive à tout le monde de ne pas réaliser ce dont on avait envie. Il faut garder le cap, y aller étape par étape.

Qu’as-tu appris grâce à ton sport et comment t’a t-il fait grandir ?
J’ai appris les valeurs que je viens d’évoquer, notamment la patience. Ça a été mon grand problème, l’impatience, surtout la patience par rapport à soi, quand on est jeune on voit les autres qui explosent, d’autres qui stagnent, il faut rester focalisé sur sa progression à soi. La persévérance aussi, continuer de croire en son entraînement, les choses que l’on met en place, se dire que ça marchera forcément. Le sport et l’athlé ont révélé l’homme que je suis aujourd’hui, mon caractère.

En quoi ton environnement est-il idéal pour t’entrainer ?
(NDLR : Fabien se retourne et regarde autour de lui) Vous pouvez le voir, je suis à 10 minutes du stade, de la piste, de la salle de muscu, pourtant je n’habite pas en ville, je suis en bordure de champs donc j’ai des kilomètres et des kilomètres de parcours que ce soit en forêt, dans les champs, de la route, j’ai tous les types de terrains et de sols. Pour limiter les blessures je vais en forêt, si je veux faire des séances ou des footings un peu plus rapides je vais sur la route, j’ai tout à disposition. Tout est réuni. J’ai le sauna, une petite salle de PPG à la maison donc pendant le confinement ça ne posait pas de problème, il y a plusieurs salles de muscu au stade, une halle, deux pistes (une de 400, une de 150), tout un terrain de cross autour, vraiment tout ! Franchement on peut difficilement faire mieux !

Grâce à ces outils, jusqu’où voudrais-tu aller ? Quelles sont les compétitions qui te font rêver ? Le titre que tu voudrais avoir à ton palmarès ?
J’ai toujours eu comme objectif de faire les Jeux Olympiques, avec la performance que j’ai réalisé aux championnats de France sur 10000m je me rends compte que vraiment tout est possible. Avant j’y croyais aussi mais c’était pas pareil, là vraiment ça y est, on y est. En termes de titres, forcément un titre Olympique même si c’est très compliqué, il ne faut pas se contenter de viser que la participation aux Jeux, il faut y aller pour un titre ou une médaille, sur une course tout est possible. Il faudra y aller étape par étape avant donc forcément des titres européens et mondiaux aussi.

Sur 5000m et 10000m ?
Sur 5000, 10000 et puis marathon, on va forcément y venir, ce n’est qu’une question de temps. J’ai peut-être même la perspective plus tard de pourquoi pas faire un peu de trail. Mais bon je vais déjà rester sur des épreuves olympiques et puis on se fera plaisir autrement après. J’ai déjà pleins de défis et objectifs pour les 10-15 prochaines années déjà !

Quelle est ta séance préférée et l’endroit où tu préfères t’entrainer ?
J’aime beaucoup tout ce qui est allures intermédiaires, tempo, seuil, sorties longues actives. J’aime aussi les spé 5000 – 10000, quand ça va vite, c’est là que tu as le plus de sensations. J’adore m’entrainer sur piste, au stade Colette Besson juste à côté de chez moi. J’aime bien m’entraîner juste derrière chez moi aussi, le matin, sur mon petit segment Strava. L’endroit que j’adore aussi c’est Font-Romeu, je pense que je vais y passer de plus en plus de temps. Tu es à la montagne, tu es déconnecté et focus, j’adore l’ambiance que l’on y trouve.

Justement parle nous de ton segment alors, qu’a-t-il de particulier et en quoi te représente-t-il bien ?
C’est très simple, j’ai dû le faire des milliers de fois depuis que j’ai commencé à courir. Il se trouve à un petit kilomètre de la maison et il s’étend sur un kilomètre donc même quand je courais 20-30 minutes quand j’étais petit, je passais par là. C’est mes premiers footings, mes premières sorties à pied et depuis je le fais plusieurs fois par semaine, vraiment j’ai dû le faire des milliers et des milliers de fois.

Strava a récemment lancé la récompense Local Legend, où est-ce que les gens ont pu t’apercevoir courir le plus souvent ? As-tu déjà eu cette impression d’être le coureur reconnu de ta ville ?
Oui et non ! On me voit courir les matins sur le tour qui comporte mon segment, je pars de la maison et j’y vais, c’est là que je cours le plus souvent. Il y a des gens que je croise presque tous les matins, ils doivent commencer à se dire « lui il court beaucoup ! » mais sinon je ne suis pas forcément reconnu dans le quartier. Certains voisins me demandent des nouvelles, mes résultats et d’autres pas du tout. Encore l’autre jour, j’étais sur un footing avec ma mère qui me suivait en vélo, un voisin m’a dit « bonne séance », j’ai répondu que j’étais en footing alors il m’a demandé si je préparais les jeux pour rigoler et je lui ai répondu que oui effectivement, ceux de 2024 (rire). Il était étonné. Il y a des gens qui suivent et d’autres qui ne sont pas du tout au courant de mon activité, le contraste est assez marrant.

Avec ton niveau tu as surement dû ramasser quelques CR sur des segments pendant tes entraînements. Est-ce que c’est quelque chose auquel tu prêtes attention ? Es-tu déjà parti à la chasse aux CR ? 
Je n’y prête pas forcément attention mais c’est toujours sympa d’être le plus rapide sur un segment. Je n’y accorde pas plus d’attention parce que l’important pour moi ce sont les vraies compétitions, en championnat ou en meeting, les compétitions officielles. Je vois plus Strava comme un moyen d’échanger autour d’une passion commune et d’échanger avec la communauté running. Je ne suis pas sur Strava en mode compétition mais je comprends aussi que cela peut aider certains à se dépasser !

Du coup quel est ton conseil pour battre le record sur ton segment ? Connais-tu quelqu’un qui pourrait te prendre ce segment ?
Oui, Alexis (NDLR : Miellet) pourrait le prendre (rire). Ce n’est pas un segment très technique, il est assez plat mais un peu long, il fait 1 kilomètre donc il ne faut pas partir comme sur un 200m et bien gérer son effort. Le terrain est très souple et très agréable pour courir, il y a juste une petite racine au départ dont il faut se méfier et la fin termine un peu en single track donc attention à ne pas croiser un cycliste, il vaut mieux y aller tôt ou assez tard.

As-tu des suggestions de clubs ou d’athlètes à suivre sur Strava ?
Je commencerais par le Tempo Run Club pour les clubs ! En athlètes je dirais Jimmy (NDLR : Gressier) qui s’est mis à Strava récemment, Alexis Miellet, Quentin Malriq, les frères Gras (Michael & Damien) qui partagent beaucoup, il y a de quoi faire !

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